Transport parti de Paris le 15 avril 1943 (I.92.)

Une semaine exactement après le précédent, le vingt-septième transport « NN » vers le SS-Sonderlager Hinzert part de Paris le jeudi 15 avril 1943. Il est composé de détenus français de Fresnes et du Cherche-Midi, regroupés dans des wagons de voyageurs, aménagés en wagons cellulaires aux fenêtres grillagées. La destination du transport est la gare de Trèves, en Allemagne. Là, les déportés sont descendus et doivent attendre un autre train qui les emmène jusqu’au village de Reinsfeld, dernière halte ferroviaire avant la marche forcée jusqu’au camp spécial d’Hinzert, distant de sept kilomètres.

Tous au départ de France sont classés « NN » par les autorités d’occupation en raison des motifs de leur arrestation, mentionnés par le décret Keitel promulgué en décembre 1941 instituant la procédure « Nacht und Nebel ».
Ainsi, 4 concernent la détention illégale d’armes par des personnes dénoncées pour posséder une arme de chasse chez eux, sans qu’il soit établi qu’elles avaient l’intention de s’en servir contre l’occupant. Par ailleurs, 5 personnes sont stoppées à la frontière franco-espagnole alors qu’elles tentaient de quitter le territoire pour rejoindre les Forces Françaises Libres, acte considéré par les autorités d’occupation comme une volonté d’aide à l’ennemi, au même titre que l’hébergement de soldats alliés cachés sur le territoire français pour 2 hommes de ce transport. Enfin, 4 résistants, membres du réseau Gilbert, à Lille et à Paris, sont arrêtés à la suite d’une dénonciation d’un agent double. Internés à Fresnes, ils sont soumis au régime « NN » et accusés d’espionnage contre l’armée allemande.

Après quelque temps, ces « NN » quittent le camp spécial d’Hinzert au cours de trois transferts : un premier emmène 4 hommes en juin 1943 à la prison de Diez-sur-Lahn et deux autres sont organisés en direction de Wittlich en juillet et octobre 1943, d’où les déportés sont amenés successivement au tribunal spécial de Breslau, en Silésie, chargé des affaires « NN » venant de France. Les condamnations connues sont soit des travaux forcés, exécutés dans la prison de Brieg ou la forteresse de Sonnenburg, soit de la prison accomplie à Schweidnitz ou à Wolfenbüttel. Les différentes peines prononcées ne sont pas accomplies dans leur totalité puisque les Allemands décident, à la fin de l’année 1944, l’abandon de la procédure « NN » et la remise des détenus concernés dans des camps de concentration. Cela se concrétise ici par des transferts vers les KL Gross Rosen et Flossenbürg. Puis, jusqu’à la libération, d’autres transferts vers d’autres KL sont connus. Mais, malgré la volonté des Allemands de rassembler tous les détenus dans des KL, certains déportés ne connaissent pas l’entrée dans un KL et finissent leur parcours dans une prison, comme Brandenburg-Görden ou Hirschberg, l’avancée des troupes alliées rendant plus difficiles de tels transferts.
Parmi les rescapés de ce transport, il faut signaler le cas de la double déportation de Charles Cathelineau. Déporté une première fois ce 15 avril, il réussit à s’évader au cours d’un transfert entre Breslau et Gross Rosen et rentre en France. Il est alors dénoncé et repris. Interné en France, il est à nouveau déporté le 15 août 1944 dans le transport parti de la gare de Pantin à destination du KL Buchenwald sous le numéro « 78009 »[2]. Il est transféré vers Dora, puis Ellrich et libéré le 15 avril 1945 au KL Bergen-Belsen, juste deux ans après sa première déportation.[3]

Guillaume Quesnée

[1]Cet effectif n’est attesté par aucune liste de départ ou d’arrivée en Allemagne et il a donc été établi à partir du croisement de diverses sources. Mais, pour un certain nombre de déportés, si l’on sait qu’ils sont « NN » envoyés à Hinzert, on ignore la date de leur déportation et ils sont donc présentés dans la liste alphabétique « hors transport » des déportés à Hinzert (I.301.).

[2]Voir la notice correspondant à ce transport I.264..

[3]Renseignements recueillis dans le dossier-statut de l’intéressé.

Dernière mise à jour : 2008-07-30